Incertitude et surcharge d'information - AFAM #94

Incertitude et surcharge d'information - AFAM #94

Pourquoi sommes-nous accro à l'info ?

Vous aussi, ça vous arrive de penser au travail pendant un jour "off" ?

Pire, votre attention se fait happer par une notification (mail ou chat) potentiellement urgente.

Vous avez envie de penser à autre chose, mais vous ne pouvez pas vous empêcher de savoir.

Cette appétence pour l'information, c'est le signe que vous évoluez dans un contexte incertain. Et c'est bien normal : l'incertitude fait partie intégrante du challenge quand on est manager.

Mais est-ce qu'il n'existerait pas une manière plus équilibrée de gérer l'incertain, sans subir une surcharge informationnelle ?

Des neuroscientifiques et des paléoanthropologues se sont penchés sur le sujet pour comprendre comment notre cerveau fonctionne, et d'où nous viennent ces réflexes.

Notre rapport à l'information n'est pas qu'une question de volonté : c'est avant tout une question de survie et de pouvoir !

Sans plus attendre, voyons cela de plus près 🔍

L'information, c'est la survie

La manière dont notre cerveau fonctionne est issue de conditions de vie radicalement différentes des nôtres aujourd'hui.

Quand nos enjeux du quotidien étaient les prédateurs qui voulaient nous croquer, des tribus ennemies prêtes à en découdre ou le manque permanent d'eau, de nourriture et d'abri, notre rapport à l'information était bien différent.

Le moindre bruit, le moindre mouvement, la moindre lumière était une question de vie ou de mort.

Notre cerveau est le fruit de cette adaptation. Et ça, les géants de la Tech l'ont bien compris.

Les notifications et les sons, vibrations et pastilles rouges associées, font appel à ces parties profondes de notre cerveau.

Face à ces signaux liés à la survie, notre volonté et notre motivation tombent en miettes.

Et le pire, c'est que quand on regarde la notification et qu'on découvre une information cruciale, qu'elle soit positive (une promotion, un devis validé...) ou négative (une candidature non-retenue, une mauvaise nouvelle de votre équipe sur un projet...), le mécanisme se renforce.

"Tu vois, nous dit le cerveau, tu as bien fait de regarder ton téléphone. Cette information est vraiment importante, il n'aurait vraiment pas fallu passer à côté."

La prochaine fois que votre téléphone bipera, vous vous souviendrez - plus ou moins consciemment - de ces messages importants que vous avez reçus par le passé et vous ne pourrez pas y résister.

Le problème, c'est quand ces distractions et ce "multi-tasking" interfèrent avec votre capacité à vous déconnecter pour recharger les batteries ou vous concentrer.

Ce mécanisme fonctionne aussi pour les likes et commentaires sur les réseaux sociaux ou le tchat de l'entreprise : la validation sociale était une nécessité à l'époque des tribus.

Ce qui nous mène à notre deuxième point.

L'information, c'est le pouvoir

Nos ancêtres humains vivaient en petits groupes, dans la nature.

La concurrence pour les ressources était rude et ces émotions fortes menaient inévitablement au conflit.

Une fois de plus, des informations sur des sources de nourriture ou des abris stratégiques étaient la clé de la survie et leur connaissance devait rester secrète.

Aujourd'hui, ces tendances tribales sont toujours en nous.

Certes, l'eau, la nourriture et les abris ne sont généralement plus un problème.

Mais les informations vraiment pertinentes restent une denrée rare.

Une fois qu'on en obtient, on n'a pas vraiment envie de les partager.

"Le vrai pouvoir, c'est la connaissance" disait le philosophe Francis Bacon il y a 300 ans déjà.

Ce mécanisme est à l'origine des silos organisationnels.

Vous pouvez voir les Business Units comme des petites tribus en concurrence pour obtenir des ressources stratégiques clé : des informations.

Quand ces émotions sont déclenchées, notre intérêt particulier prime au détriment de l'intérêt général de l'organisation.

Et c'est normal : à l'époque des tribus, c'était l'intérêt de notre groupe qui primait car sa survie en dépendait.

Pour changer, il faut d'abord comprendre notre fonctionnement "naturel", notamment les biais cognitifs qui peuvent nous jouer des tours.

Ce n'est qu'une fois cette prise de conscience faite qu'on peut implémenter de nouvelles habitudes vertueuses pour rendre nos comportements bénéfiques, à la fois pour nous-mêmes, nos collègues et notre organisation.

Les limites de l'accumulation d'information

Face aux enjeux liés à l'incertain, notre cerveau réagit de manière très basique à l'information : il en veut toujours plus.

Le problème : notre mémoire de travail ne peut traiter qu'un nombre limité d'items à la fois.

Résultat : même si notre confiance augmente au fil de notre récolte d'informations, les décisions qu'on prend à la fin n'en sont pas pour autant meilleures.

C'est ce qu'a démontré une équipe de chercheurs de l'Université de Toronto en 2008 (Tsai, Klayman & Hastie, 2008).

L'expérience est simple : tester la capacité de fans de football à prédire l'issue d'un match en fonction des informations qu'on leur présente.

L'expérience est divisée en 6 étapes.

Lors de la première étape, on donne 6 informations clés aux fans, et on leur demande un pronostic.

À l'étape suivante, on ajoute 6 informations, et on redemande un pronostic. Et ainsi de suite pour les 6 étapes.

À la fin, les fans s'en sortent bien : ils donnent le bon pronostic 2/3 du temps. Mais ce qui est surprenant, c'est que le taux de réussite est stable pendant les 6 étapes de l'expérience.

Autrement dit, avoir plus d'information n'augmente pas la qualité de la décision et du résultat. Mais ce qui change, c'est la confiance ressentie en le résultat donné, comme on le voit sur la figure suivante.

On voit donc que l'incertitude peut nous pousser à agir de façon contre-productive : on va chercher à augmenter son degré de confiance, alors que la qualité de nos décisions est toute aussi bonne avec un nombre plus limité d'éléments à considérer.

À une époque où l'information est disponible instantanément et dans des quantités hallucinantes, c'est bien sur sa propre tolérance à l'incertitude qu'il faut travailler.

Conclusion

Le rôle du manager est d'optimiser les performances de son équipe en prenant les meilleures décisions possibles.

Toutefois, dans un contexte incertain, un bon nombre de décisions doivent être prises avec une information limitée.

Notre cerveau tolérant mal l'incertitude, il va chercher à se rassurer en récoltant le maximum d'information possible, avec des conséquences néfastes pour notre charge mentale.

Chez Teambakery, nous sommes convaincus qu'une meilleure compréhension des biais auxquels nous sommes soumis permet d'envisager chaque problématique sous un angle nouveau - et plus efficace.

C'est bien un équilibre entre certitude rigide et remise en question permanente qu'il faut trouver pour être un manager efficace.

Cette démarche demande du courage car il faut accepter à la fois l'incertitude et les conséquences de ces décisions.

C'est tout pour cette semaine !


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À la semaine prochaine !

Baptiste.